L'armistice du 11 novembre 2018 relève de la fin de ce Centenaire 14-18. Conjointement aux grandes manifestations, les citoyens dans leur village, témoignent à la mémoire des combattants. A Saint-Alban-les-Eaux (42) est organisée les 9, 10 et 11 novembre une exposition consacrée aux événements de la Grande Guerre avec notamment des dessins de Jean Rouppert, représentant une critique sans concession de la guerre.

Par ailleurs, la librairie Le Carnet à Spirales à Charlieu montre aussi une série de dessins de ce Poilu qui a fait la guerre de bout en bout comme artilleur.

Lettre de Jean Rouppert à son épouse Madeleine du 13 avril 1918 accompagné d'un dessin Ma cagna du 16 avril 1918

''Petite Mady aimée, je pense à cette lettre sur laquelle je n'avais d'abord fait aucun commentaire et où tu exaltes le sentiment du sacrifice sur l'autel de la Patrie. Dût mon orgueil être considérablement flatté de ce titre de héros et malgré que ces idées soient éminemment respectables et même attendrissantes, je me récuse devant ton tribu d'admiration, m'amaour. Nous, les pauvres brutes courbées sous l'esclavage de ce progrès ayant mûri vingt siècles pour aboutir à pareil fiasco ? Nous, des héros !! A ce compte, les ânes traînant leur charrette méritent une couronne de laurier, le soir venu, à l'heure du picotin. On est un héros lorsque l'on est le porte-flambeau d'une idée, non lorsque l'on est l'esclave d'un régime. Quand donc ceux de l'arrière comprendront-ils la réelle portée de l'affreux drame. Ne verront-ils dans le soldat que de la vie sacrifiée pour un peu de vanité et d'ambition. Il n'y a là que des volontés contraintes, de la chair qui souffre, une résignation plus sombre sous le faix toujours plus écrasant. Je ne t'en dis pas plus en ce sens, tu me comprends bien. Nos lettres ne sont même plus à nous. Si tu as pu avoir à de certains moment une perception autre de la réalité, je doute qu'elle se soit produit par réflexe, à mon insu instinctivement comme tu dis. Il n'y avait que la volonté d'être calme, il faut les garder, m'amour quoique ce que je viens de dire me fasse descendre du piédestal où tu m'imagines et me dédore et me désauréole. Les idées exaltantes, fiévreuses, les sentiments exaltés ou romanesques sont comme les boissons alcoolisées, cela peut donner un coup de fouet, mais cela ne tient pas devant la matérialité. Or voici bientôt quatre ans que la guerre dure. Crois-tu que si la guerre devait durer éternellement nous n'évoluerions pas vers d'autres pensées ? Nous raisonnerions de façon nouvelle en acceptant des éléments nouveaux que nous rejetons encore maintenant. On vivrait quand même avec des données diamétralement opposées. Oh, le vent soufflant en nos esprits et pour lequel on tue !..... Je te bise de tout mon cœur, mienne à moi. Ton Jeannot''
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